05.05 – 10.06.2018

FRAGMENTS SCANDINAVES 2016 /2017

Luc Marelli
GALERIE NUMAGA
COLOMBIER / NEUCHATEL
rue de l’Étang 4, CH-2013 Colombier
tél : +41 (0)32 842 42 59
Direction Neuchâtel, sortie autoroute :
Auvernier - Colombier
De la gare CFF de Neuchâtel :
bus 120, arrêt St.Etienne
ou de la place Pury :
tram 215, arrêt Colombier
du mercredi au dimanche de 14 h 30 à 18 h 00.
Vernissage

Fragments scandinaves

(...)

Passant improbable - Il s'efface dans le paysage gris des premiers jours. Je pars m'immiscer dans l'incandescence provoquée par la découverte de cet immense territoire. Coups de poing au fil des vallons. Vertige. Paysage primaire. Je me cache dans le sous-bois pour ne pas interrompre la jubilation des oies sauvages sur la plaine en déneige. La nuit revient avant qu'un seul jour ne se soit posé sur la vallée. Je me hâte vers les premières maisons pour ne pas perdre les traces qui s'effacent dans l'obscurité. Hypnotisé par les troncs blancs des bouleaux. Quelques rennes paisibles pénètrent dans le hameau. Flairant autour des maisons réchauffées, précoces délicatesses, des plages d'herbes libres ; ils s'invitent en ombres chinoises aux premières fenêtres qui s'éclairent.

(...)

Maintenant - La chaleur vient dans la forêt mixte. S'y enfoncer. Repos des sens. Chaleur délicate. Glisser sur les tapis d'aiguilles de mélèze, embarqués par la forêt. L'écorce des bouleaux flotte en drapeaux dans le vent. Presque une mue animale. Borborygmes des mousses à notre passage. Au loin le lac dans ses lèvres vertes brille comme de l'acier. Les grandes herbes telles des géants immergés sommeillent. De leurs respirations l'étang clapote. Ils rêvent, mille oeufs de grenouilles, les yeux enlacés dans le temps. Entre les copeaux de roseaux, messager somptueux un air frais annonce le printemps. Je vois Tapsa au loin qui brasse le ciment pour restaurer le fourneau extérieur du sauna antique.

(...)

1

Tu vois, pour moi, les couleurs sont des personnages, des guides. Elles dansent, ondulent, ricochent. Il leur arrive de rencontrer des formes. Dialectique visuelle que j'essaie d'ouvrir, à bras le corps. Parfois elles se mêlent dans une joute pimentée qui s'approche de la grâce et qui le plus souvent m'échappe. Je m'huile les mains dans un rituel savoureux et je prépare cette balade improvisée. Toiles et couleurs dans les bacs. Puis je pars vers les butineuses, respirer le pollen et la lumière naturelle. Loin des nuages de médium à la térébenthine. En quête de messages.

7

Dans ce rien de saison fécondée, c'est à la fois suspension du temps linéaire, bouffée d'air, fécondation des poussières et crainte d'oublier de raconter l'essentiel.

12

En quelques instants la lumière change et se dilate sur la surface peinte. Un orage me presse à dire. Des perles grises aux présences polymorphes couvrent la toile, balayée par des bourrasques. Avant qu'ils ne se diluent, attraper les mélanges de peinture au coin des bacs.

17

Le sujet de la toile, tantôt complice, tantôt comparse retors, se mue en vieux gamin déboussolé. Délaissé à l’automne, emballé durant les transhumances, c'est l'époque où de central le sujet se dissout. Naguère apprivoisé, il est devenu chien errant. Le thème de la peinture, seul, sur des chemins abandonnés, se cache ou applaudit. La toile aborde sa mue.

(...)

A Grisslehamn, une bande de corneilles grises nous regardent apprécier nos petits pains à la cardamome. L'oeil de profil et le bec en salive. Elles jouent magnifiquement leur rôle, faussement désabusées, et, nous laissent nous éloigner, avant de fondre sur les miettes.

(...)

Rideau - Un rouge-gorge gonfle les joues et siffle camouflé dans l'ombre verte. Nouvel été avec ses tendresses et ses torpeurs. Espérer le vol immuable des abeilles, comme une acclamation tellurique. Les souvenirs partagés, silencieusement font leur chemin sur les toiles. En quête de synthèse et de calme, pédaler à travers la campagne aux heures les plus chaudes jusqu'à l'assèchement et pénétrer dans un demi sommeil, une torpeur qui suggère délicatesse et légèreté au peintre encore hésitant.